Soigneusement entassés dans deux chambres funéraires, ils
ont dormi 3300 ans enfouis dans le sable, échappant aux pillards. Comme une
chrysalide pour l’envol vers l’au-delà d’un pharaon mort à 20 ans. Une
parmi tant d’autres dont une civilisation industrieuse a ensemencé les déserts
à l’Ouest du Nil pendant trois millénaires.
Statues, lits, chars, trônes, armes, sceptres
entassés ont été minutieusement dégagés, pour accéder à quatre coffres
emboîtés, tout aussi dorés et élégamment gravés que les trois sarcophages
emboîtés qu’ils renfermaient. Visiteur du Musée égyptien du Caire, j’ai la
chance de pouvoir les détailler longuement le long des trois vastes salles qui leur sont consacrées.
Etourdi par cette profusion de richesses, plus encore
par le raffinement, la finesse de
chacun de ces objets précieux, j’entre
dans une salle obscure aménagée sur le côté. Nouvel éblouissement : dans une
série de vitrines brillent d’une lumière sépulcrale deux sarcophages
dorés
et les bracelets, colliers, pectoraux, amulettes qui
constellaient par centaines les bandelettes qui entouraient la momie de
Toutankhamon.
Ecarquillant les yeux, les visiteurs se pressent dans une ambiance
quasi religieuse pour admirer un à un ces chefs d’œuvre d’art
funéraire. Délicatement ciselés en or et pierres précieuses, ils
donnent un tel
relief, une telle présence aux scarabées ailés, cobras, et autres
vautours
symboliques que je ne me résigne pas à les qualifier de simples «
bijoux ».
Ni à voir dans cette collection un « trésor ».
Suffirait à m’en convaincre la figure qui irradiait du
centre de la salle une lumière intemporelle : le célèbre masque
funéraire de Toutankhamon.
Quel visage !
La
coiffe d’apparat et la barbe rituelle soulignent la
douceur et la perfection de traits juvéniles. La posture est légèrement
solennelle, l’attitude impassible mais de grands yeux tristement
candides reflètent une fragilité toute humaine. Nous regardant sans
nous voir,
ils semblent interroger le destin.
Nous ne connaîtrons jamais le visage exact du Toutankhamon
historique. Sa dépouille est absente. Je suis face à une représentation idéale,
un idéal humain.
Pour nos contemporains, pharaonique signifie souvent gigantesque, monstrueux, voire inhumain. Voilà pourtant un
saisissant témoignage d'une sensibilité, d'un sens de la mesure, de la finitude
humaine débordant la solennité et le faste attachés à la figure du roi-dieu
Pharaon.
Dans notre monde si marqué par les fantasmes de puissance,
de contrôle, de domination - du corps et de l’esprit, de la nature et de
l’humain, du passé et de l’avenir...- , j’y vois une émouvante leçon d’humilité et d’humanité.
J'aurai voulu être une petite souris et t'observer tel un enfant découvrant tant de beauté.
Ton inconditionnelle admiratrice.
Rédigé par : chitzay | 09 mars 2008 à 17:25