Jeudi 31 janvier 2008, une Vie, une œuvre sur
France Culture avait pour sujet John Ford (1894-1973). Certes une
référence avec plus de 300 films des années 1920 aux années 1960, célèbre
depuis « la chevauchée fantastique » en 1939. Mais je ne suis pas
grand amateur de western. Cependant l’émission m’a passionné : j’y ai
trouvé des éclairages saisissants sur l’art du réalisateur au cinéma et sur
l’évolution de la culture américaine au XXe siècle. Quelques extraits :
« Ford est pour la conquête de l’Ouest, pour la
destinée manifeste des Etats-Unis, l’intervention des Etats-Unis dans les
divers conflits, notamment les deux guerres mondiales. Il est pour
l’impérialisme, on pourrait dire… mais certainement pas sans états d’âme.
Il est très conscient du prix que cela coûte en
souffrances, en massacres, en injustices, en familles brisées, en Indiens et
autres massacrés, etc. Il montre tout ça finalement.
Jean-Loup Bourget. professeur de littérature
et d'études cinématographiques américaines,
auteur de "John Ford"
éd. Rivages
« La question de la communauté est indissociable de celle du
héros. Il y a trois types de personnages dans les films de Ford :
- Les personnages qui sont complètement réfractaires à
l’ouverture de la communauté, droits dans leurs bottes, rigides, par exemple
Henry Fonda dans Le massacre de Fort Apache (…) C’est l’Amérique
repliée sur elle-même.
- Les personnages qui veulent trop s’ouvrir et qui
risquent presque de se dissoudre, ceux qui veulent trop parler, qui veulent
aller vers l’autre sans aucune notion de ce qu’est la nation. Eux disparaissent
complètement du cadre.
- Les personnages pour lesquels Ford a le plus
d’affection, souvent ceux incarnés par John Wayne en l’occurrence, qui est le
personnage du milieu on pourrait dire, celui qui tente de faire dialoguer le
champ et le contre-champ… exemplairement dans le massacre de Fort Apache, le
rôle du capitaine York qui est pris d’un côté entre la rigidité du colonel
Thursday, incarné par Henry Fonda, et de l’autre Cochise, le chef indien. »
« On pourrait diviser l’œuvre de Ford en deux périodes :
celle de la confiance absolue dans la maison Amérique, celle du désenchantement
et du doute. »
Jean-Baptiste Thoret Historien et critique de
cinéma
« John Ford détestait
répéter, il aimait tourner de manière à ce qu’il y ait des accidents. Les
acteurs devaient toujours intégrer les accidents. Il balançait des chiens, des
chevaux, des gens inattendus au milieu des prises. (…) Et si ça créait un
petit quelque chose, c’était bien. »
« Ce que
m’avait dit Richard Widmark : « Ce n’est pas un homme qui va vous
expliquer ce que vous devez faire. Mais par sa manière de poser la caméra
à un certain endroit, il va créer un espace où vous serez forcément
confortable. Ça, c’est de la direction d’acteurs ! »
Bertrand Tavernier (cinéaste)
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